Comme les (nouvelles) technologies,
l'univers de la santé évolue et s'améliore sans cesse et ce
depuis l'Antiquité.
Le
siècle dernier a consacré une amélioration significative des
techniques médicales (imagerie, nouveaux médicaments, etc.) et du
confort des patients mais aussi a consacré l'innovation notamment en matière des
biotechnologies et en robotique.
Concernant
la robotique, il est intéressant de savoir que, pour la sphère
médicale, elle ouvre un large champ des possibles grâce à la
robotique chirurgicale mais également grâce aux androïdes qui
pourront jouer un rôle d'assistance aux personnes âgées ou
handicapées.
De
nombreuses règles juridiques peuvent s'appliquer aux robots avec
en priorité les droits de propriété intellectuelle (droits
d'auteur, droit des brevets, droit des bases de données, etc.) mais
également le droit pharmaceutique qui peut considérer le robot
comme un dispositif médical défini à l'article L.5211-1 du code de
la santé publique1.
Au
delà des règles applicables aux robots, il est intéressant de
s'interroger sur le statut juridique du robot en tant que tel.
Contrairement à ce qu'il avait été évoqué dans le billet
« Réglementation des drones et droit des robots » publié
sur ce blog, et, selon Mme Mendoza-Caminade2,
« il n'apparaît pas souhaitable de conférer un statut propre
aux robots mais il est préférable de les maintenir dans la
catégorie des choses. Quel que soit son degré de sophistication,
l'intelligence artificielle ne permettra jamais de conférer à
l'androïde une conscience, une volonté qui lui soit propre. Ce ne
sont pas des personnes dotées d'une conscience et d'une dignité et
elles ne constituent pas des sujets de droit ».
Autre
nouveauté notable, c'est l'émergence d'une nouvelle conception de
la santé à savoir la santé personnalisée ou encore la santé
connectée.
A
travers le mouvement du quantified self3,
cette santé met en avant les données de santé, données sensibles,
non définies légalement et dont la publication reste un enjeu
juridique. En effet, ces données sensibles doivent être protégées
au titre de la protection de la vie privée et ne doivent être
dévoilées que de façon limitative.
L'exemple
de la biométrie illustre bien la conciliation juridique entre la
protection des données à caractère personnel et des libertés
individuelles avec l'utilisation des nouvelles technologies de
santé.
Selon
la CNIL, la biométrie regroupe l’ensemble des techniques
informatiques permettant d’identifier un individu à partir de ses
caractéristiques physiques, biologiques, voire comportementales. Les
données biométriques ont la particularité d’être uniques et
permanentes. Elles permettent de ce fait le "traçage" des
individus et leur identification certaine. Le caractère sensible de
ces données justifie que la loi prévoit un contrôle particulier de
la CNIL fondé essentiellement sur l’impératif de proportionnalité
et sur la finalité sécuritaire4.
Par
exemple, la CNIL
considère que les empreintes digitales génèrent un risque de
traçabilité qui peut être exploité aux dépens des personnes
physiques. En conséquence,5
une base de données d’empreintes digitales peut être détournée à
d’autres fins que l’objectif poursuivi à la création.
C'est
pourquoi, les dispositifs de reconnaissance biométrique sont
soumis à l’autorisation préalable de la CNIL6.
Mais
lorsque ces données de santé sont délivrées par des objets
connectés, il n'est plus certain que le traitement de ces données
soit encadré. Il existe aujourd'hui des partenariats entre des
sociétés d'assurance et des sociétés d'objets connectés.
Heureusement, juridiquement, l'assureur ne peut pas encore avoir
accès directement aux données de santé qui restent protégées par
le secret médical7.
Il
apparaît donc important de mettre en place « un droit au
contrôle » des puces RFID afin de garantir à leurs usagers la
maîtrise de la diffusion de leurs données personnelles produites
par ces outils. Ceci
supposerait que leurs utilisateurs puissent
à tout moment désactiver la fonctionnalité permettant la
communication des données, en application de leur droit
d’opposition.
Enfin,
il convient de terminer avec le rappel suivant, avec toutes ces
innovations et ces nouvelles pratiques dans le domaine de la santé,
les responsabilités du professionnel de santé mais également
celle du patient restent inchangées et demeurent un enjeu juridique
important.
Concernant
la responsabilité du praticien, le recueil du consentement du
patient demeure primordial et le devoir de conseil qui lui incombe
en devient donc renforcé.
L'utilisation
de capteurs de santé ou de matériaux connectés provoquant
d'éventuels dommages sur le patient promet de belles batailles
juridiques où chaque partie prenante dans le dommage (du fabricant
de l'objet, du propriétaire de logiciel au praticien qui l'utilise
en passant par le patient lui même par sa mauvaise utilisation) va
tenter de s'exonérer de sa responsabilité.
En conclusion, le
progrès médical et le bien-être évoluent de pair mais cela ne
doit pas se faire au détriment de la vie privée.
N'oublions pas que
selon le code civil8
le corps humain est inviolable et ne peut faire l'objet d'une
commercialisation.
Par
une interprétation extensive, ne serait-il pas sage d'estimer que
les donnés de santé doivent elles aussi faire l'objet de
restrictions d'usage et ne pourraient même avec le consentement de
la personne faire l'objet d'exploitations commerciales sous une forme
identifiante ?
Sources :
- CNIL - Cahiers IP n°2 – Innovation et prospective – Le corps, nouvel objet connecté ? Du Quantified self à la m-santé : les nouveaux territoires de la mise en données du monde.
- Interview de Thomas Roche dans le magasine Expertises des systèmes d'information n°400 de mars 2015 « La santé : des données très connectées ».
- RLDI n°108 - octobre 2014 supplément - Actes du colloque : « Santé et nouvelles technologies en Europe » - Université Toulouse I – Capitole – 18 avril 2014 .
1 L'article
L.5211-1 du code de la santé publique : « On entend par
dispositif médical tout instrument, appareil, équipement, matière,
produit, à l'exception des produits d'origine humaine, ou autre
article utilisé seul ou en association, y compris les accessoires
et logiciels nécessaires au bon fonctionnement de celui-ci, destiné
par le fabricant à être utilisé chez l'homme à des fins
médicales et dont l'action principale voulue n'est pas obtenue par
des moyens pharmacologiques ou immunologiques ni par métabolisme,
mais dont la fonction peut être assistée par de tels moyens.
Constitue également un dispositif médical le logiciel destiné par
le fabricant à être utilisé spécifiquement à des fins
diagnostiques ou thérapeutiques ».
2 La
santé et la robotique RLDI n°108- octobre 2014 supplément « Actes
du colloque : santé et nouvelles technologies en Europe –
Université Toulouse I – Capitole du 18 avril 2014.
3 Selon
la CNIL, le quantified self est traduit en français par
l'auto-mesure est un mouvement qui vise au « mieux-être »
en mesurant différentes activités liées au mode de vie.
4
Par exemple, la CNIL a subordonné la création d’une base
centralisée de données d’empreintes digitales à un "fort
impératif de sécurité" car cette technique demeure
risquée en termes d’usurpation d’identité.
5
« les empreintes digitales…. Des traces qui peuvent être
explotées à des fins d’identification des personnes à partir
des objets les plus divers que l’on a pu toucher ou avoir en
main » CNIL, 21ème rapport d’activité, p 113,
La Documentation française, 2001.
6 Article
25 de la loi n°78-17 de la loi relative à l'informatique, aux
fichiers et aux libertés.
7 En
2014, un partenariat a été mené entre Withings et Axa qui consistait à proposer la remise d'un podomètre à tout souscripteur d'une complémentaire santé Axa.
8 Selon
l'article 16-1 du code civil : « Chacun a droit au
respect de son corps. Le corps humain est inviolable. Le corps humain,
ses éléments et ses produits ne peuvent faire l'objet d'un droit
patrimonial ».
dans ce cas nous pouvons affirmer que la technologie sera au service de l'homme, ce n'est pas le cas partout
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